Risque sanitaire potentiel à cultiver en ville : cas de la ville de Dschang au Cameroun

Á Dschang, les décharges sauvages de déchets ménagers et les activités artisanales non contrôlées (notamment la métallerie) ont conduit à la pollution des sols par des éléments traces (Cr, Cu, Pb, Zn) avec un risque pour la santé humaine en raison de l’inhalation de poussières de sol et de la consommation de cultures vivrières produites à proximité des sources de pollution.

Comme la plupart des villes africaines, Dschang (200 000 habitants, Cameroun) a connu une croissance démographique et économique importante ces deux dernières décennies, et sa population devrait doubler au cours des vingt prochaines années. Cette expansion s’accompagne d’une intensification des activités humaines, et de la production d’effluents et de déchets de toutes sortes, dont ceux issus des activités artisanales et domestiques. Ces déchets contiennent pour certains des éléments traces (ET) tels que As, Cd, Cr, Cu, Hg, Ni, Pb et Zn qui contaminent les sols.

Au-delà de la pollution environnementale, l’effet sur la santé de la population se pose avec l’inhalation de poussières et la consommation de productions alimentaires contaminées. Les cultures vivrières informelles se répartissent sur toute la ville, notamment à proximité d’activités artisanales (e.g. métallerie) ou à proximité de décharges sauvages. Par ailleurs, les sols cultivés sont amendés par des matières organiques non contrôlés, notamment des composts issus de déchets urbains.

La distribution spatiale des ET dans les sols de la ville de Dschang a été étudiée pour identifier leur origine (géogénique vs. anthropique). Les sols de 71 sites (analyses de surface complétées, pour certains sites, à différentes profondeurs) ont été analysés à l’aide d’un spectromètre portable de fluorescence X (pXRF). Les sols des sites associés à des activités liées aux métaux ont montré les niveaux de contamination les plus élevés (concentrations moyennes en mg/kg : As, 8,2 ; Cr, 213,7 ; Cu, 201,8 ; Pb, 97,4 ; Zn, 838,0), suivis par les décharges de déchets ménagers et les parcelles agricoles. La diminution des concentrations d’ET avec la profondeur (notamment pour le Zn) soutient l’hypothèse d’une origine humaine (par rapport au fond pédogéochimique des sites témoins). L’approche géostatistique par la méthode de la vibrisse supérieure sous-estime le risque pour la santé lié à la consommation de cultures provenant de plusieurs sites.

Plus précisément, 87,32 %, 49,30 % et 47,89 % des sites ont dépassé la valeur de référence pour les productions alimentaires (selon les valeurs guides proposées par l’Agence Régionale de Santé d’Ile-de-France) pour le Cr, le Zn et le Cu, respectivement. Notre étude souligne la nécessité d’utiliser des méthodes basées sur les risques pour la santé, en particulier pour les utilisations sensibles des sols telles que la production alimentaire.

Alors qu’une méta-analyse récente menée par Hou et al. (2025) indique que 16 % des sols mondiaux destinés à l’alimentation sont pollués par les ET (sur la base de 800 000 analyses), avec un risque élevé pour la santé publique (0,9 à 1,4 milliards d’habitants vivant dans ces régions) et l’environnement, la situation du continent africain reste peu documentée. Il s’agira d’étendre ce travail à d’autres villes camerounaises et de comparer les résultats à d’autres pays (partenariats avec la Côte d’Ivoire – consortium ACCAO – et le Sénégal).

Ces études ont été financées par Nantes Métropole et le LPG. Le pXRF est un instrument mis à disposition par l’Osuna.

Référence bibliographique : Lekemo, D., Lebeau, T., Amani, I., Kenne, E. R., Tsafack, H. N., Gaudin, P., & Temgoua, É. (2025). Geostatistical and Food Risk Assessment of Soils Contaminated by Trace Elements in the City of Dschang (Cameroon). Urban Science, 9(11), 467. https://doi.org/10.3390/urbansci9110467

Publié le 1 décembre 2025