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Séminaire “Observabilité de signaux interannuels en provenance du noyau terrestre à partir des mesures de géodésie spatiale” par Séverine Rosat (ITES, Strasbourg)
31 mai 2023 @ 10h00 - 11h00
De nombreux verrous scientifiques restent à résoudre concernant l’intérieur profond de la Terre. Cela concerne aussi bien la valeur de certains paramètres physiques (conductivité électrique du manteau inférieur, densité des provinces à faibles vitesses sismiques, viscosité de la graine, stratification en densité du noyau, valeur du champ magnétique à l’interface graine-noyau, etc…) que l’existence encore débattue de couches stratifiées au sommet et à la base du noyau. La dynamique des écoulements fluides dans le noyau est directement accessible via le géomagnétisme. Les données magnétiques, en particulier les variations séculaires du champ, sont habituellement utilisées afin de reconstruire les écoulements fluides dans le noyau. Les modèles de flux ainsi obtenus souffrent cependant de non unicité, se limitent aux grandes échelles spatio-temporelles et reposent sur certaines hypothèses sur la forme de l’écoulement. Ils ne peuvent pas représenter la dynamique rapide du noyau aux échelles de temps inférieures à quelques années. La sismologie, les expériences à haute-pression et la géochimie apportent des informations indispensables sur la composition et la structure du noyau mais les variations de densité demeurent irrésolues en profondeur.
La géodésie a un rôle à jouer pour apporter des contraintes complémentaires sur la connaissance de la structure et dynamique du noyau terrestre et à ses interfaces. Les mouvements fluides dans le noyau entraînent des variations de densité par le déplacement de structures hétérogènes qui vont engendrer des variations de gravité à la surface de la Terre. Les panaches mantelliques et les plaques plongeantes, les processus de dissolution/cristallisation à la frontière du noyau génèrent aussi des perturbations de la densité. En plus de l’effet en densité, des déformations élastiques vont intervenir afin de rétablir l’équilibre mécanique de la planète et perturber également le champ de gravité. Les mouvements fluides dans le noyau par différents processus de couplage aux interfaces vont également induire des rotations différentielles de la graine et du noyau perturbant la rotation et la pesanteur terrestre. L’étude des variations temporelles de la rotation terrestre, du champ de pesanteur et de déformation de surface induites par ces processus nous apporte ainsi des contraintes sur la dynamique et la structure interne du noyau.
Après une revue des différents processus internes au noyau et de leurs effets en terme de déformation de surface et de perturbation de la gravité terrestre, nous montrons que les amplitudes prédites sont trop faibles par rapport à la précision actuelle des observables géodésiques. En revanche, les effets sur la rotation terrestre des écoulements dans le noyau fluide sont mis en évidence. Un lien direct entre modes quasi-géostrophiques du noyau et variations de la longueur du jour est en particulier mis en avant aux périodes interannuelles, donc à des échelles de temps plus courtes que celles décennales communément admises comme étant dues au couplage électromagnétique entre noyau et manteau. Finalement, de nouvelles contraintes sur la rotation différentielle de la graine sont obtenues par gravimétrie spatiale.